Pour un
nouveau système politique libanais.
La crise
que connaît le Liban depuis octobre 2019.est sans doute
la plus grave depuis son indépendance.
Au-delà d’un effondrement économique, financier et social, et d’une énième crise politique, il s’agit d’une crise institutionnelle remettant en
cause son système politique. Force est de constater que le Liban, dans sa configuration actuelle, est un Etat failli. Tandis que la présence de plus d’un million de réfugiés
syriens et palestiniens sur son sol et la volonté du Hezbollah de changer le
visage du pays menacent son identité même. Autant que son arsenal, le Hezbollah
tire sa force de la division du camp chrétien, de la
faiblesse du camp sunnite et de la couverture que lui assure la trahison de
Michel Aoun. Si les dénonciations dont
il fait l’objet se font de plus en plus entendre, peu d’initiatives sont prises
pour contrer son hégémonie et beaucoup
de ses opposants sont enclins à céder à son pouvoir d’intimidation. Pourtant
le parti pro-iranien n’a jamais été
aussi isolé sur les scènes internationale et locale, depuis la décision des
pays du Golfe de boycotter le Liban et la diatribe violente d’Hassan Nasrallah
contre la monarchie saoudienne qui a achevé de dresser contre lui une large
frange de l’opinion sunnite et des
partisans du CPL Quant à son arsenal, il ne sert à rien sur la scène locale car toute attaque
contre les régions chrétienne, sunnite ou druze se heurterait à l’armée et serait de toute façon
politiquement suicidaire. Enfin les prochaines échéances électorales, qu’il s’agisse des élections
législatives au printemps ou présidentielles à
l’automne prochain ne peuvent que lui être défavorables, même s’il ne manquera pas, comme il l’a fait
dans le passé d’utiliser son pouvoir de blocage. S’il n’est
question d’affronter
militairement le Hezbollah et que ce dernier ne renoncera jamais à ses armes, il existe d’autre moyen pour se libérer de son
pouvoir de nuisance. D’abord en réunissant un congrès en vue de former une large coalition regroupant tous les partis
et les mouvements souverainistes. Ensuite en jetant les bases d’une auto
gouvernance des régions échappant à son emprise, à même de leur assurer certains services
publics, à l’instar de ce qu’il fait
lui-même et de l’état dans l’état qu’il
a bâtit dans les régions chiites. Cette initiative doit être un premier pas
vers l’instauration d’une large
décentralisation administrative et
financière qui pourrait s’imposer de facto au vu de la déliquescence de l’Etat central
et des services publics et en cas de blocage de l’élection présidentielle,
actant définitivement la faillite du système politique consensuel actuel.
Certes la partie chiite est totalement opposée à toute forme de décentralisation,
comme l’atteste son projet de faire du Liban une circonscription unique qui
masque mal ses ambitions hégémoniques. Mais c’est le seul moyen de conjurer le spectre du
« grand remplacement » et d’assurer
l’avenir à long terme de la présence chrétienne. Au vu de l’existence de deux visions
incompatibles de la vocation et de
l’identité du pays et de l’impossibilité
des Libanais laissés à eux-mêmes de
s’entendre sur un nouveau contrat
social, on se dirige probablement vers un arbitrage, voire une tutelle internationale comme
l’ont été le Règlement organique de 1863 et l’accord de Taëf de 1990. La forme que prendra le
règlement de cette crise véritablement existentielle dépendra en partie des accords de Vienne sur le
nucléaire iranien dont d’aucuns craignent qu’ils me risquent de conforter l’influence de Téhéran au Liban.
Ibrahim Tabet
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