La solution hypothétique du conflit syrien et le Liban
La conclusion d’un accord partiel (et
provisoire ?) de cessez-le feu en Syrie qui ne concerne pas la guerre
contre Daech ne signifie pas nécessairement qu’une solution politique soit en
vue. L’éradication probable à terme du
« califat » terroriste au Nord-est du pays écarte sans doute le
spectre de la remise en question de ses frontières. Mais elle ne garantit pas
sa réunification, et encore moins
l’instauration d’une démocratie inclusive et une réconciliation nationale. De sa fragmentation en cantons ethnico-confessionnels à l’instauration d’un pouvoir central,
forcement dominé par la majorité sunnite, à
Damas, en passant un système fédéral ou un régime politique
communautariste, il est difficile de prévoir la configuration future du pays.
La volonté d’autonomie des Kurdes se heurte à
l’opposition turque et de la majorité sunnite en Syrie. Comme il est exclu que Bachar-el-Assad puisse gouverner toute la Syrie, et qu’un
réduit alaouite n’est pas viable, un des nombreux problèmes qui se posent est
le sort des Alaouites. Au vu de la
faiblesse de l’opposition laïque, le risque de l’instauration d’un pouvoir
islamiste à Damas n’est pas à écarter. Enfin il est douteux que les millions de
déplacés, victimes d’une épuration
délibérée, ou chassés de leurs
régions à cause des combats, puisse y retourner de sitôt. C’est encore plus
le cas des réfugiés dans les pays voisins. A la complexité de ces problèmes endogènes, s’ajoute ceux posés par
les intérêts divergents des protagonistes externes au conflit. Si
l’influence de la Russie et de l’Iran s’est
renforcée, il est douteux que l’Arabie Saoudite et la Turquie
renoncent à la leur. Et l’apparente convergence de vue entre Washington,et Moscou, du moins sur ce dossier, ne garantit pas qu’ils puissent imposer leurs vues aux
autres protagonistes régionaux et locaux
du conflit.
C’est dire que le sort de la Syrie, et par
ricochet celui du Liban, est incertain. Il ne faut pas s’attendre à ce que le million et demi de réfugiés syriens
présents sur son sol puisse retourner
dans leur pays avant très longtemps, avec le
risque sécuritaire et d’implantation d’un grand nombre d’entre- eux
que cela comporte. L a volonté internationale d’empêcher la déstabilisation du
pays est contrebalancée par son souhait apparent de lui faire assumer ce
fardeau. La déliquescence de l’Etat
illustrée par l’incapacité d’élire un président de la République
n’augure rien de bon. Et la présence
massive de réfugiés syriens ne peut qu’inquiéter les chrétiens et creuser le clivage entre les communautés sunnite et chiite ; cette dernière estimant que
la tournure des événements en Syrie joue en sa faveur. Rien ne garantit donc la
pérennité du système politique bancal
actuel. Et il faut espérer que l’expérience tragique qu’a connue le pays du fait de la présence
palestinienne ne se renouvelle pas.
Ibrahim Tabet, avril 2016
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