Pourquoi je suis agnostique
« Si Dieu a
créé l’homme à son image, l’homme le lui a bien rendu ».
Voltaire
« Avant
le Tout il y avait le Rien
Après
le Tout qui aura- t-il ? »
Jean d’Ormesson
Elevé dans la foi catholique par des
parents pratiquants et ayant fait mes
études primaires et secondaires dans des écoles
religieuses, j’ai longtemps gardé la foi, et il ne me serait jamais venu
à l’esprit de douter de l’existence Sde Dieu, même après n’avoir plus entretenu
avec l’église qu’un commerce épisodique ; parfois pour la messe de Noël
dont la célébration ne manque pas d’ailleurs de m’émouvoir. Comme la plupart
des croyants, je ne me posais pas trop de questions sur les fondements du dogme
chrétien et ma méconnaissance de l’islam et des autres religions était presque
totale. Puis, les circonstances de la vie et mes lectures m’ont amené devenir
agnostique, posture
intellectuelle différente du matérialisme athée, fondée sur le
questionnement. Je pense que spiritualité, morale et croyance en
Dieu ne sont pas nécessairement liées, ce qui ne
m’empêche pas d’être attaché à mon
identité culturelle chrétienne
L’invention des dieux
Face aux mystères de l’univers, les hommes, ne pouvant
se livrer qu’à des conjectures sur ce qui est au delà de leur savoir, inventèrent les dieux. De l’animisme l’humanité est passé au polythéisme puis pour « les religions du Livre » au
monothéisme. Au cours de la préhistoire est apparue une forme primitive de
religiosité sacralisant la nature et
les rituels de la mort témoignaient de l’idée
qu’il existait une vie dans l’au-delà. Les
premières représentations de divinités apparurent il y a seulement dix mille
ans à l’aube du néolithique Les esprits du tonnerre des orages ou de la pluie furent convertis en divinités sexuées. Les déesses mères, symboles de fécondité et
de fertilité, précédèrent les dieux. Certains historiens des religions pensent qu’il
s’agissait à l’origine d’une même Grande Déesse-mère qui fut plus tard appelée
Inanna à Sumer, Ishtar à Babylone, Isis en Égypte et Anat par
les Cananéens.
Les dieux finirent par
les supplanter avec la
constitution de sociétés patriarcales. Apparut
ensuite l’idée de l’existence d’une divinité suprême mais non
exclusive, faisant l’objet d’un culte qualifié de monolâtrie, étape intermédiaire entre le polythéisme et
le monothéisme. Parallèlement à la
théogonie (création des divinités) les
religions de l’Antiquité avaient développé des cosmogonies : systèmes
mythiques d’explication de la naissance
de l’univers.
Représentée
par le disque solaire, source de vie, la première idée d’un Dieu unique et exclusif formulée par Akhenaton ne lui
survécu pas. Puis,
au bout d’une longue maturation, les
Hébreux se rallièrent à
l’idée, développée par une succession de prophètes d’un seul Dieu, à la
fois transcendant, omnipotent, omniscient,
créateur de toute chose et éthique.
Le Dieu de Moïse était décrit en termes psychologiques : colérique,
content, triste, aimant ou haïssant, un Dieu jaloux et guerrier. Ce n’est
qu’après le retour de l’exil à Babylone, que les prophètes tardifs développèrent
une littérature de sagesse traduisant un questionnement spirituel et brossant
dans les psaumes l’image d’un Dieu aimant et compatissant, proche du
cœur des fidèles. A l‘époque de l’exode, Yahvé, tout en exigeant un culte exclusif ne
nie pas encore l’existence des autres dieux et l’idée d’un seul Dieu ne s’imposa définitivement qu’au VIe
siècle avant notre ère, contrairement à
l’assertion de la Bible qui la fait remonter à Abraham. C’est à la même époque qu’apparut en Perse un autre
monothéisme, le Zoroastrisme, adorant un Dieu unique et éthique, Ahura Mazda, qui, comme le Dieu de l’Ancien Testament, protège les fidèles et punit les pécheurs. La Bible
dont une partie a été rédigée durant l’exil à Babylone comprend de
nombreux emprunts aux mythes mésopotamiens ainsi qu’au zoroastrisme. Parmi les
emprunts théologiques à cette religion figurent le Messie sauveur, les anges,
le paradis et l’enfer et le jugement
dernier.
Il existe des images primordiales communes à
toutes les religions : celle du
soleil, de la déesse mère, du dieu
incarné en un être humain, du dieu qui
meurt et qui renait. Marie, « mère de Dieu » a remplacé dans le christianisme les déesses
des religions polythéistes. Certains
événements de la vie de Jésus
ressemblent étonnamment à ceux de
divinités mythiques comme sa conception miraculeuse d’une
vierge ; sa résurrection trois
jours après sa mort ; sa naissance
le 25 décembre, jour du solstice d’hiver.
Cette date aurait
été fixée dans l'Occident latin, pour coïncider avec la fête romaine du Sol
Invictus|. Comme Jésus, Krishna, avatar du dieu Vishnou, est né d’une
vierge (Devakil) a été baptisé dans un fleuve (le Gange), a effectué des
miracles, utilisait des paraboles pour enseigner au peuple l’amour, ressuscita
d’entre les morts, monta ciel et fut transfiguré devant ses disciples. Mithra
est né selon la légende d’une mère vierge, vint du ciel le 25 décembre pour
s’incarner en tant qu’homme. Il était connu comme « Sauveur » et
« fils de Dieu », et avait avec douze disciples, il voyagea loin et beaucoup en tant
qu’illuminateur des hommes. Il s’éleva des morts, un événement célébré
annuellement avec beaucoup de
réjouissances.
Les grandes religions de l’Antiquité avaient
une conception trinitaire de la divinité qui sera reprise par le christianisme.
Le dogme chrétien d’un seul Dieu en trois personnes
a une analogie avec l’antique doctrine ésotérique de Pythagore pour qui le
« UN » et le « TROIS » formant le Tétragramme sacré sont
les deux premiers nombres d’or, la clef de voûte de l’univers. Voici ce qu’en
dit la théosophie ou sagesse des dieux : « le microcosme homme est, par sa
composition ternaire : esprit âme et corps, à l’image du macrocosme
univers : monde divin, humain et naturel, qui est lui-même l’organe
ineffable de Dieu, lequel est Père, Mère et Fils, essence substance et vie. Une
Mère devenue l’Esprit-Saint dans le christianisme. Le Père, le Fils et le
Saint-Esprit des chrétiens c’est Osiris Isis et Horus chez les Égyptiens,
Brahma, Shiva et Vishnou chez les hindouistes, Zeus, Déméter et Apollon chez
les Grecs. Lesquels ne forment qu’UN pour les grands guides mystiques de
l’Antiquité qui considéraient le polythéisme comme la religion du peuple. Pour
eux, la multiplicité des dieux ne faisait que symboliser mythiquement les
forces cosmiques émanant d’un être suprême dont ils croyaient à l’unicité mais
en réservaient l’enseignement à un cercle étroit d’initiés. Dernière religion
universelle, l’islam, rejetant la doctrine trinitaire, est revenue au concept
de l’unicité absolue de Dieu
Jésus est-il
Dieu ?
Jésus fera du Dieu national d’Israël un
Dieu d’amour. Mais il n’a pas voulu abroger la loi juive. C’est
Paul, apôtre des gentils, qui a fondé une nouvelle religion de salut universel, distincte du judaïsme. A l’ancienne alliance
entre Dieu et le peuple élu succède une nouvelle alliance entre Dieu et l’ensemble de l’humanité, fondée sur la foi en la divinité du Christ mort et ressuscité pour le salut de
l’humanité. Jésus lui-même n’avait jamais affirmé
explicitement qu’il fût Dieu. A la
différence des Évangiles synoptiques
de Luc, Mathieu, et Marc où Jésus est désigné indifféremment sous les termes de « Messie, de Fils de l'homme et de Fils de Dieu »,
celui plus tardif de saint Jean, est le seul où sa divinité est mise dans la bouche du Christ. Jésus y est
présenté comme le Verbe fait chair, l’incarnation du logos divin. Concept
emprunté à la philosophie grecque, le
logos est pour Jean la pensée et la parole de Dieu par laquelle il
a créé le monde. La notion de Verbe qui s’est fait chair- appelée
incarnation - va dès lors réorienter
toute la réflexion des chrétiens sur l’identité de Jésus.
Pour l’exégèse moderne le récit de la naissance merveilleuse et de la
vie du Christ, tel que relaté dans les
évangiles canoniques, rédigés bien après sa mort, est en partie mythique. Et les miracles comme la résurrection de Lazare ont sans
doute été inventés pour les besoins de la cause. Plusieurs
événements de la vie de Jésus ont
été inspirés de symboles astrologiques et
de mythologies communes aux
croyances et aux dieux de l’Antiquité, sa naissance le 25 décembre, jour du
solstice d’hiver, accompagné de l’apparition d’une étoile à l’est
sur laquelle se guident les rois mages,
sa conception miraculeuse d’une vierge,
sa résurrection trois jours après sa mort, ses douze
disciples, nombre symbolique
représentant entre autres les douze
tribus d’Israël. Mais cela n’enlève
rien au fait qu’aucun prophète, y compris Bouddha, n’ait enseigné des principes
moraux et éthiques aussi élevés et aussi ambitieux et au caractère résolument
novateur et universel de son message.
Hérésies et orthodoxie
Le
principe de l’unicité de Dieu fit
qu’entre déclarer que Jésus et le fils de Dieu et affirmer sa divinité, il ya
un pas que les premiers chrétiens hésitent à franchir. Dans Comment Jésus est devenu Dieu Frédéric Lenoir explique comment de la croyance que Jésus est fils de
Dieu, on passa à la croyance qu’il est
Dieu fait homme, puis au mystère de la trinité. Les
dogmes fondateurs de la doctrine chrétienne n’ont été élaborés par les
quatre conciles œcuméniques (Nicée, Constantinople, Ephèse et Chalcédoine) qu’à
la suite de longues controverses trinitaires et christologiques. Il a fallu quatre
siècles à l’Église pour proclamer le dogme de la trinité et
pour résoudre la question des relations entre Jésus-Christ et Dieu le Père.
Comment a-t-il été
engendré par le Père ? Est-il Dieu comme lui et ayant la même substance ?
Ou un être divin créé par lui et subordonné à lui, comme le professait
l’arianisme ? Les querelles
christologiques portaient sur la
coexistence en Jésus de l’humain et du divin. Est-il d’abord homme ou d’abord Dieu ? Le
Saint-Esprit procède t’il seulement du Père ou du Père et du Fils ? La mention « filioque » demeure, un sujet de controverse entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe. Une autre controverse concerne
la personne de Marie. Le fait que le Nouveau Testament mentionne que Jésus avait des frères peut-il remettre en question
sa virginité ? Peut-on la considérer comme « la mère de Dieu » ? Les réponses à ces questions donnèrent lieu à
des doctrines condamnées par l’Eglise catholique. Certaines firent long feu alors que d’autres
ont connu une audience plus large (comme
l’arianisme), ou même subsistent encore aujourd’hui comme le monophysisme et le
nestorianisme. Au Ve siècle « l’hérésie » nestorienne qui veut distinguer en lui l’homme
et le fils de Dieu, ainsi que le monophysisme pour qui le Messie a une seule
nature, divine, ont fait l’objet d’une double condamnation par le concile de
Chalcedoine en 451. Celui-ci réaffirme la doctrine de la coexistence en Jésus
de l’humain et du divin « en une seule personne en deux natures engendrée
par la vierge Marie mère de Dieu ».
Les sagesses asiatiques
L’idée du Dieu
personnel des
trois religions du Livre: « humain, trop humain pour être croyable » selon
Nietzsche est absente des sagesses asiatiques. Le Brahman de
l’hindouisme est un Absolu impersonnel dont on ne peut rien savoir et dont le rôle n’est
ni de récompenser ni de punir. Il
se manifeste à travers une d’une multitude de divinités dont la triade suprême
formée par Brahma, Vishnou et Shiva. Autrement plus proche de la cosmologie moderne que
le récit biblique est, d’après Hubert Reeves, la vision hindoue de la formation et de l’évolution de l’univers symbolisée par le
dieu Shiva incarnation de l’éternelle
énergie cosmique.
Les croyances hindouistes, chinoises et japonaises
ne sont pas exclusives comme les religions monothéistes. Elles admettent la
pluralité des voies pour atteindre la libération. Bouddha qui se proclame l’éveillé, ne se déclare ni prophète d’un Dieu, ni son envoyé et rejette même l’idée d’un
Etre suprême.
Dieu, la philosophie et la science : questions sans réponses
Pourquoi
y-a-t-il chose plutôt que rien ? Se demandait Leibnitz. Qui a créé l’univers ? Y-a-t-il
une cause première et une fin dernière ? Un dessein cosmique qui
aurait une fin éthique ? Ce sont les questions auxquelles tendent de
répondre, la gnose (tentative raisonnée de démontrer l’existence de Dieu en se
passant des religions révélées), la philosophie, la métaphysique et l’ontologie (science de l’Etre). Elle a donné
lieu à trois formes de réponses : panthéiste, émergente et théiste. Pour
le panthéisme, l’Être suprême n’est autre chose que l’univers. D’après la
théorie émergente rien dans l’univers ne prévoit un stade futur, mais une
naissance de formes de plus en plus évoluées. Pour le théisme, l’Être suprême est extérieur à l’univers qu’il
a crée pour le bien..
La philosophie des Lumières voit l’amorce d’une critique systématique de la religion considérée
comme une superstition dépassée, du
moins en Europe, qui aurait atteint « l’âge adulte de l’humanité »
selon l’expression de Kant. C’est aussi la
thèse d’Auguste Comte auteur de la
loi des trois états selon laquelle l'esprit humain passe successivement par
« l'âge théologique », et par « l'âge métaphysique », pour
aboutir enfin à « l'âge positif ». Max Weber a fait de l’histoire de
l’Occident moderne celle du « désenchantement du monde », de la
sortie du monde magique de la religion. Il souligne l’importance du processus de
rationalisation caractérisé par l’effacement de la croyance
irrationnelle dans l’action de Dieu dans le monde. Tout
en attaquant le
théisme Voltaire, postule l’existence d’un Grand-Horloger s’apparentant
au Grand-Architecte de l’univers des
Francs-maçons. Pour le matérialisme athée, Dieu n’existe pas. Scientifique et
philosophe des Lumière athée, Holbach récuse le théisme comme le déisme. Hume réfute l’argument consistant à prouver
l’existence de Dieu par l’ordre de l’univers.
Au XIXe siècle la religion est qualifiée « d’opium du
peuple » par les marxistes. Nietzche proclame « la mort de
Dieu ». Hegel représentant de
l’idéalisme ne croit pas à l’existence d’un Dieu personnel, mais
affirme celle d’un Esprit Absolu connaissable « la raison étant la réalité
primordiale de l’univers ». Au XXe
siècle Le la critique philosophique de la religion est poursuivie par des
penseurs comme Heidegger qui, dans sa Phénoménologie
de la religion, déconstruit les fabrications de mythes inhérentes aux religions. Cependant certains philosophes, même athées, estiment qu’il existe
probablement une intelligence suprême derrière
la création. Pour eux l’évolution de
l’univers, ainsi que la montée de la complexité qui a finalement accouché de la conscience, ne saurait être uniquement
le fruit du hasard.
La
science, elle, ne s’occupe pas du « pourquoi ? » et n’a rien à
dire sur ces questions qui ne relèvent pas de sa compétence mais de la
philosophie et de la foi. Cela n’a pas
empêché des scientifiques chrétiens, comme le père Teilhard de Chardin, de tenter
de démontrer la compatibilité entre les théories modernes de l’évolution du
cosmos et la foi. D’autres penseurs n’écartent pas le principe anthropique selon
lequel l’univers a été conçu dès le départ pour favoriser le développement de
la vie et du cerveau humain, au terme d’un long processus de croissance de la
complexité. Ils affirment que la constante cosmologique qui accélère le
développement de l’espace-temps est trop bien réglée pour être le fruit du
hasard, et qu’une intelligence devait nécessairement être impliquée pour
produire l’extraordinaire complexité du code génétique inscrit dans l’ADN. Il en est de même de
la thèse du dessein intelligent (« Intelligent
design ») qui constitue une version pseudo-scientifique du créationnisme.
Partant du principe indémontrable que rien ne naît de rien, ils en tirent un argument en faveur de l'existence de
Dieu. Pour les tenants de cette thèse,
certaines caractéristiques de la nature sont mieux expliquées par une cause
intelligente plutôt que par un processus non dirigé tel que la sélection
naturelle.
L’accélération
du progrès scientifique a profondément changé notre vision du monde. La
génétique est entrain de décrypter les codes du vivant. La neurobiologie :
les lois physico-chimiques gouvernant l’interaction entre le cerveau et la
pensée. La cosmologie est en voie de savoir comment est né notre univers. (Mais
pas ce qu’il y avait « avant », s’il retournera au néant après
« la brève histoire du temps », et s’il n’y a pas d’autres univers).
Elle est en mesure de reconstituer son évolution depuis le Big bang jusqu'à
l’homme à travers les lois du hasard et de la nécessité. Dans « Patience dans l’Azur », Hubert
Reeves explique comment l’enchainement des évolutions nucléaire, chimique,
biologique et enfin anthropologique, ainsi que la montée de la complexité ont,
pour employer les mots, « accouché de la conscience ». La question du
rapport entre l’esprit et la matière est entrain d’être élucidée. Pour la
science moderne, lumière, énergie, matière et « esprit » ne sont que
plusieurs manifestations d’un même principe universel, plusieurs substances
d’une même essence. Cette découverte dément le dualisme judéo-chrétien
affirmant la séparation entre l’esprit et la matière et donne raison au monisme
philosophique. La physique quantique a montré qu’au niveau
subatomique, l’univers ressemble plus à une vaste pensée qu’à une immense machine. Sa réalité fondamentale
sous-jacente est celle d’un champ
immatériel doté d’intelligence et d’une
certaine « liberté ». Plus la science progresse, plus se confirme
qu’il y a une limite physique au-delà de laquelle notre seule raison est
impuissante à expliquer la réalité. Cet effondrement d’un modèle réducteur
purement matérialiste et déterministe est une réhabilitation des thèses idéalistes
et spiritualistes par la physique moderne. Les particules
élémentaires auraient de ce point de vue une certaine analogie avec les
intuitions de la tradition ésotérique,
la notion d’âme du monde de la théosophie et l’Esprit absolu de Hegel.
Après la phase
d’opposition entre la science et la théologie, assistera-t-on à une certaine
réconciliation entre ces deux formes de quêtes de la vérité ? Pour des philosophes comme Bertrand Russel, il ne
faut pas mélanger les genres. Ils ne contestent pas l’existence d’un
« antihasard » dans l’univers ainsi que la complexification graduelle de la matière. Mais cela ne prouve
pas à leurs yeux l’existence d’un démiurge créateur du monde et encore moins
que celui-ci ne se confonde avec le Dieu bon des trois religions
monothéistes. Pour Stephen Hawkins qui
par ailleurs n’exclut pas l’existence de plusieurs univers .le pacte qui voulait que les sciences répondent au «comment»,
laissant la philosophie et les religions régler le problème du «pourquoi», n'aurait
plus de raison d'être, tant la recherche se frotte aujourd'hui à l'essence même
de notre monde. Dans son dernier ouvrage : « Y-a-t-il un Grand Architecte de l’Univers », il affirme qu’il est inutile d’imaginer un
plan, un dessein, un créateur derrière la nature. La science explique bel et
bien à elle seule les mystères de l’univers tel qu'on le connaît qui
s'est formé à partir de rien.
Les progrès de la science font qu’il
est difficile de croire aujourd’hui que l’univers et la vie soient nés de la
volonté d’un « créateur ». A supposer
que ce soit le cas, la conception hindouiste d’un Absolu impersonnel me parait
plus satisfaisante pour l’esprit que celle anthropomorphique du Dieu personnel
de la Bible qui intervient dans les affaires des hommes. La
majorité les hommes vivent sous
l’influence de religions non monothéistes
Tel est le cas de l’hindouisme du bouddhisme et du shintoïsme. Parmi les planètes habitables de notre
galaxie et de l’univers, il existe probablement des extraterrestres
intelligents ayant sans leurs propres
religions. Il faut avoir la foi du charbonnier pour croire que Dieu
aurait envoyé ses prophètes, le Christ et Mahomet, pour assurer le salut des
seuls habitants de notre planète. Comment
croire à la résurrection des corps à la
fin des temps et au jugement dernier ? À quel moment l’espèce homo a-t-elle été
pourvue d’une âme immortelle dont ses ancêtres australopithèques étaient privés
? Après la mort, nos atomes s’éparpillent dans l’univers, pour se réincarner à
l’infini, dans d’autres combinaisons, dans d’autres corps, plus ou moins
solides, plus ou moins éthérés. La théorie hindouiste de la métempsychose
serait-elle pour autant moins invraisemblable que la vision judéo-chrétienne de
l’au-delà ? Les atomes sont éternels, mais cela veut-il dire que notre
identité survive indéfiniment aux multiples recompositions subies par les
particules qui furent notre moi ? Se peut-il qu’il en reste quelques
traces ? Que la mémoire de notre bref passage sur terre continue d’habiter
telle ou telle particule de matière disséminée dans l’univers, à la manière des
fantômes habitant certaines vieilles demeures ?
Si un
Être suprême existe, il est partout, en nous, autour de nous, sur notre
minuscule planète et dans les étoiles qui parsèment la voute grandiose de la
basilique de l’univers. Là où je me sens le plus proche de « Lui »
c’est quand, du haut d’une montagne ou au fond du désert je contemple le ciel
dans le silence religieux de la nuit. Nulle part ailleurs la pureté de l’air et
l’horizon infini ne permettent de voir scintiller autant d’étoiles. « Au
commencement était la Lumière ». Remontant par la pensée au Big bang
originel, je me dis que l’homme descend des étoiles et qu’à notre mort les
atomes de ce qui fut notre moi se dissoudront dans l’univers et que, poussière
galactique, ils retourneront à leur origine.
Ibrahim Tabet
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